LE ROLE DES NORMES DANS LE CADRE D’UNE SEMIOTIQUE DE LA CULTURE
$avtor = ""; if(empty($myrow2["author"])) { $avtor=""; } else { $avtor="автор: "; } ?>University of Bologna, Italy (annamaria.lorusso@unibo.it)
Je voudrais concentrer mon attention sur quelques points qui sont à mon avis cruciaux pour encadrer le travail de la sémiotique de la culture, en essayant de définir ce que lui est propre et qui fait la différence par rapport à d’autres approches (par exemple, la socio-sémiotique, une sémiotique tout simplement narrative, ou bien toutes les sémiotiques caractérisées par un champ-objet précis: la sémio de l’art, de la littérature, du cinéma etc…).
J’y tiens à préciser tout de suite la thèse centrale de ma brève contribution : à savoir, que la spécificité de la sémiotique de la culture doit se situer au niveau des normes: pas au niveau de la langue et pas au niveau des actes de parole, mais bien à celui des normes.
Je crois que trop souvent notre activité sémiotique a été une sémiotique de la langue ou bien une sémiotique de la parole (ou a eu tendance à se penser en tant que telle). On peut voir un intérêt pour la langue dans les travaux de Propp d’où Greimas a tiré son schéma narratif (universel!), dans le travail de Barthes sur la mode, dans les travaux linguistiques de Saussure ou d’Hjelmslev…
Pas moins nombreux les exemples de sémiotiques de la parole: toutes les analyses, souvent magnifiques, d’oeuvres d’art, d’oeuvres littéraires (Deux amis de Maupassant par Greimas, Sylvie de Gérard de Nerval par Eco), des films…
Un travail encore à faire, ou à développer, serait le questionnement du passage de l’un à l’autre niveau, c’est à dire le questionnement du passage des actes de parole aux systèmes de la langue.
Comment ça se passe? Quelles sont la relation, la direction et la dialectique entre parole et système?
Dans mon travail j’ai de plus en plus l’impression qu’un des points essentiels, pour la sémiotique de la culture, soit précisément ce passage, et que ce passage ne soit rien de plus que le procès de normalisation et de standardisation que le sens subit.
Il s’agit évidemment d’un passage qui a à voir avec de nombreux aspects cruciaux de la réflexion sémiotique:
- le rapport type/token (le problème étant de savoir comment on passe des token au type)
- le rapport processus / systèmes
- le rapport histoire / structure
Je pense à la sémiotique de la culture comme à une sémiotique des normes parce qu’elle trouve son plan de pertinentisation dans les modèles, les standards, les habitudes qui uniformisent les actes de parole et les rendent en quelque manière systématiques, cohérents, ordonnés, structurés. C’est à dire: elle concentre son attention sur les régularités qu’on peut retrouver parmi les milliers de tokens d’une communauté, ce qu’il y a de récurrent dans les procès d’un champ donné, ce qui modifie les structures d’une culture à travers l’histoire.
Je viens d’utiliser des mots différents – normes, modèles, standard, habitudes (d’après Peirce ou Bourdieu, je pourrais dire aussi habitus) – pour définir ce niveau intermédiaire entre langue et parole. Tous ces mots, bien que afférents à des théories et traditions différentes, se situent au même plan, un plan que Saussure n’a pas beaucoup questionné mais qui était déjà assez clair à Louis Hjelmslev, qui dans Langue et parole (Hjelmslev 1943b : 89) nous rappelle que l’objet de la sémiotique est le plan de l’exécution et que c’est à ce niveau qu’on peut repérer des normes:
La théorie de l’exécution […] a pour objet ce que nous avons appelé jusqu’ici la norme, l’usage et l’acte. Norme, usage et acte sont d’autre part intimement liés ensemble et se ramènent naturellement à ne constituer qu’un seul objet véritable: l’usage par rapport auquel la norme est une abstraction et l’acte une concrétisation.
Et encore, dans :
La parole se définit comme l’ensemble des relations inter-stratiques effectivement exécutées.
L’usage, à son tour, est évidemment ce qu’il y a de stabilisé dans la parole.
[…] A la différence de l’usage, la norme doit être l’ensemble des relations inter-stratiques admises.
Le schéma sémiotique (et linguistique) par contre est en dehors de cet ordre d’idées. (Hjelmslev cit. : 76)
Les normes, donc, selon Hjelmslev, ne sont pas des règles abstraites, ne sont pas les éléments d’une grammaire, mais « l’ensemble des relations inter-stratiques admises » – ce qu’une culture inclut dans son espace comme légitime, ce qui – on pourrait dire avec Lotman – une culture « laisse passer ». Il s’agit de quelque chose qui va au-delà des actes de parole et qui est bien plus ample. Hjelmslev pose une différence importante entre les usages (ce qui est stabilisé) et les normes (les relations admises). Les normes représentent l’espace du possible, du permis, du tolérable, tandis que les usages sont simplement ce qui se passe, dans ce champ du possible (du possible pour une culture donnée, pas pour les êtres humains en général).
Je crois que cette réflexion nous invite à revenir à certaines théories sémiotiques qui nous offrent des outils pour mieux problématiser la question des normes, et que donc je considère fondamentales pour une étude sémiotique de la culture : je pense notamment à la théorie de la culture de Lotman, à la théorie archéologique de Foucault et à la théorie de l’encyclopédie de Eco avec son héritage peircien. Par conséquent, je vais proposer un petit chemin sémiotique. Mon but est de reprendre quelques uns des piliers théoriques qui peuvent donner une base solide à une réflexion sémiotique sur les normes.
La théorie de Lotman a conçu la sémiosphere comme un grand mécanisme de structuration. Je cite de Lotman-Uspensky, Sur le mécanisme sémiotique de la culture : « Le travail fondamental de la culture est organiser structurellement le monde qui entoure l'homme. La culture est un générateur de structuralité ». En plus, la réflexion lotmanienne sur la traduction se présente en tant que réflexion sur le travail de inclusion et adéquation que la culture fait, c’est-à-dire sur le filtrage qu’elle opère pour établir ce qui peut être admis à l’intérieur de son espace. Pour ordonner structurellement l’information, la culture utilise des dispositifs stéréotypant qui permettent l'uniformisation et la comparabilité entre diverses formes et expressions hétérogènes de la culture. Parmi ces dispositifs il y a le langage, l’art, la littérature, le folklore, les religions etc., c’est-à-dire des domaines sémiotiques qui offrent aux sujets humains des modèles. Lotman parle de systèmes modélisant primaires (les langues naturelles et l’espace) et de systèmes modélisant secondaires (tous les autres domaines que j’ai mentionné).
Grâce à ces systèmes de modélisation, ce travail de structuration n’est pas un travail d’imposition abstraite mais bien un filtrage concret que la culture fait avec nous, au-delà de nous et à travers nous. On peut penser aux grands choix des institutions (la censure ou la « damnatio memoriae ») mais aussi aux pratiques quotidiennes et diffusées à travers lesquelles nous définissons par exemple les régimes de visibilité (le voile, l’ostension du visage et des autres parties du corps), les régimes de dicibilité (pensons à la question du « politically correct » : peut-on dire handicapé, nègre, etc..), les régimes de sensibilité (il est évident que chaque culture et chaque époque a des passions privilégiées et des passions marginalisées : aujourd’hui par example est privilégiée l’indignation et plus marginalisé la modestie, peut-être qu’aux États-Unis est plus valorisée que en Italie l’estime de soi etc..). Il y a des moments où le problème de l’admissibilité ou inadmissibilité devient dramatique : les homicides liés aux caricatures de Charlie Hebdo nous parlent de violence, mais nous parlent aussi du fait que (pour une certaine culture, qui est une partie de la culture islamique) certaines choses ne sont pas dicibles, ne sont pas admissibles, pour des communautés données.
Je crois que Lotman – avec sa réflexion sur les mécanismes de traduction en tant que dispositifs stéréotypant, avec la centralité qu’il donne à la catégorie de modèle, avec l’idée de structuration et pas de structure – peut nous aider de manière décisive dans le questionnement des procès de normalisation du sens. Structuration signifie organisation, et organisation implique le rejet de tout ce qui est insuffisant, inutile, exceptionnel, et implique donc un processus de normalisation.
Dans notre réflexion sur le rapport entre sémiotique de la culture et niveau des normes, une autre référence fondamentale est représentée par Michel Foucault et par sa théorie de l’archive et des formations discursives. Il s’agit d’une théorie précieuse parce qu’elle nous permet de nous concentrer sur la nature contraignante de la régularité et sur la taille super-individuelle des normes. La sémiotique, à mon sens, n’a pas pensé suffisamment son rapport avec la théorie de Foucault.
A mon avis le concept de « formation discursive » nous aide à passer d’une réflexion sur les textes singuliers (en tant que tels, actes de parole) à une réflexion, de toute façon textuelle, qui est transversale à plusieurs manifestations discursives, une réflexion qui porte sur les règles qui permettent aux textes de se produire et se donner. Il est beaucoup plus utile, par exemple, de la catégorie de praxis énonciative, que la sémiotique a proposé (cfr. Bertrand 2000) pour exprimer la stratification du sens.
Foucault écrit dans L’archéologie du savoir :
Dans le cas où, entre les objets, les types d’énonciation, les concepts, les choix thématiques, on pourrait définir une régularité (un ordre, des corrélations, des positions et des fonctionnements, des transformations) on dira, par convention, qu’on a affaire à une formation discursive [...] On appelera règles de formation les conditions auxquelles sont soumis les éléments de cette répartition (objets, modalité d’énonciation, concepts, choix thématiques). Les règles de formation sont donc des conditions d'existence (mais aussi de coexistence, de mantien, de modification et de disparition) dans une répartition discursive donnée. (Foucault 1969 : 53)
Ainsi, nous voyons que avec Foucault le champ d’attention de l’analyste se rétrécit: l’analyse se concentre sur les formes du discours dans la mesure où celles-ci expriment des règles qui finalement représentent leur condition de possibilité. Dans les discours on se focalise donc sur tout ce qui a une force de modélisation, ce qui détermine le champ du dicible et de l'exprimable.
Comme on le sait, l’ensemble de ces règles de formation est à la base du savoir archéologique. Quand Foucault parle d’étude archéologique, il n’entend pas une étude tout simplement diachronique, mais l’étude des archives des cultures, c’est à dire des séries de règles qui régularisent l’apparition des énoncés.
L'idée fondamentale est que les règles se stratifient au cours de longues périodes (pas forcément de manière continuelle; le plus souvent, en effet, avec des sauts) et qu’elles forment des palimpsestes qu’il s’agit de retracer.
Objectif de l'analyste doit être de mettre à jour l'ensemble des conditions – les règles – qui régissent, à un moment donné et dans une société donnée, l'émergence des actes de parole, leur conservation dans le temps, les liens qu’il y a entre eux. Dans la culture, à travers la multiplicité et la « dispersion » (pour emprunter un mot foucauldien) des actes de parole, on peut suivre les parcours qui structurent des règles, des parcours conditionneurs, qui vont générer des séries de phénomènes homogènes.
Je vais appeler archives non tous les textes qui ont été préservés par une civilisation ou l'ensemble des pistes qui serait sauvé par sa chute, mais le jeu des règles qui déterminent une culture dans l'apparition ou la disparition des énoncés, leur persistance et leur extinction, leur existence paradoxale en tant que événements et choses. (Foucault 1968 : 47)
L'archive pour Foucault n’est donc pas un dépôt, mais l'ensemble (jamais totalisable, jamais exhaustive et épuisable) des règles, c’est-à-dire des conditions qui rendent possible l'apparition de certaines formes de culture et qui, en même temps, rendent impossible l’apparition d'autres phénomènes. L’analyse archéologique doit analyser les formes de persistance, mais non la persistance volontaire et consciente, plutôt ce qui est gardé de manière sovra-personelle à travers les médias, les techniques matérielles, les institutions, les pratiques, les comportements quotidiens ...
Umberto Eco a parlé à ce propos de « filtrage de l’encyclopédie », pour mettre en évidence la fonction fondamentale de «barrière» qui possède l'encyclopédie. Dans un contexte donné, il y a des éléments littéralement impensables, non à cause d’interdictions explicites, mais en raison de «cadres sociaux» qui ne permettent pas qu’on pense ou qu’on conceptualise certains énoncés. Par conséquent, ces énoncés tout simplement n’existent pas ; ils ne sont pas donnés, bien qu’ils ne soient pas interdits de manière explicite. La consonance avec Foucault est complète.
Les codes fondamentaux d’une culture – ceux qui régissent son langage, ses schémas perceptifs, ses échanges, ses techniques, ses valeurs, la hiérarchie de ses pratiques – fixent d’entrée de jeu pour chaque homme les ordres empiriques auxquels il aura affaire et dans lesquels il se retrouvera. (Foucault 1966 : 11)
Tout ça a évidemment beaucoup à voir avec les deux derniers auteurs que je voudrais mentionner : Umberto Eco et C.S. Peirce. Je les considère fondamentales pour définir le cadre théorétique d’une sémiotique de la culture capable d’étudier les normes.
Pourquoi Eco ?
Eco, à partir de son Trattato di semiotica generale (Eco 1975), conçoit la sémiotique en tant que « logique de la culture ». Elle est donc un savoir qui vise à définir la structuration du sens, la manière dont la sémiosis trouve une organisation en suivant des logiques et en exposant des régularités.
La logique qui est à la base de cette structuration - et donc de la sémiotique et de la culture - est une logique encyclopédique. L'encyclopédie est l'ensemble de toutes les interprétations enregistrées dans une culture ; en tant que telle, elle comprend les activités d'interprétation des individus et des collectivités et expose la connaissance moyenne d'un certain « état de culture », c’est-à-dire d’une culture donnée à un moment donné.
Eco propose donc une idée encyclopédique du sens. Il ne pense pas en termes de langue abstraite mais en termes d’un système de relations toujours en évolution, au fur et à mesure qu’on utilise les langages. Le lien entre encyclopédie et plan des actions ou actes de paroles est constitutif : l’encyclopédie se fait au cours des jours et des années et elle a toujours affaire à des substances sémiotiques (pas des formes). Elle est faite par des actes réalisés qui dans le temps trouvent une stratification, construisent des relations réciproques, sont répétés et de cette manière assument une régularité ou, au contraire, un caractère d’exceptionnalité. Ils font partie de l'encyclopédie : les significations qu’on donne aux mots, la façon dont nous interprétons les rites, les textes que dans une culture sont produits, les réactions habituelles à certains stimuli, les images qu’on laisse circuler, les symboles qui expriment certaines valeurs, etc.
Tout au long de cette production, grâce à la force de ses répétitions et de sa régularité, l’encyclopédie devient conditionnante ; les actes de parole en effet ne sont pas tout à fait libres : ils sont conditionnés par les parcours encyclopédiques précédents, et le conditionnement est de nature « statistique » (les parcours les plus fréquentes étant ceux qui conditionnent le plus les actions successives).
L’encyclopédie ouvre donc des possibilités mais rend minoritaires des parcours. Elle joue le rôle d’un réseau de possibilités et donc de conditions.
En vertu des toutes ces caractéristiques, je crois qu’elle soit une modélisation de ce que, au début, j’ai appelé le « plan des normes ». L’encyclopédie de Eco est l’ensemble des normes (ou des relations admises, comme dit Hjelmslev) dans une culture. Elle est bien plus large de l’ensemble des actes de parole effectivement réalisés, mais elle n’a pas l’abstraction d’une langue et de sa grammaire : elle est faite d’occurrences, de tokens : ses nœuds sont les unités culturelles, à savoir des unités qui – pour Eco – sont réalisés, publiques et de nature communicative.
Cette théorie de Umberto Eco n’est pas sans rappeler la théorie de Peirce et sa catégorie de habitus.
Dans la perspective de Peirce, le sens – qui est toujours soumis à une chaine interprétative – tend à se stabiliser en tant que « interprétant logique final ». Il y a donc des phases dans la sémiotisation qui, bien qu’elle ne soit jamais complète ou définitive, toutefois temporairement s’arrête. La chaine des interprétations, toujours relancée par de nouveaux actes sémiotiques, pour quelques instants (pour quelques sujets, dans quelques phases historique) s’arrête parce que la communauté reconnaît une « vérité », une forme de suffisance et justesse d’une interprétation donnée.
Ces stabilisations (les habitus) conditionnent les interprétations successives, ou, pour mieux dire, les actions successives : elles vont conditionner la manière d’agir et de réagir des sujets. Les habitus jouent donc un rôle de médiateurs entre le monde interne (mental et cognitif) et le monde externe (perceptif et pragmatique). Ils représentent des régularités qui deviennent des dispositions à agir d’une certaine manière. La force des habitus interprétatifs est en quelque manière pragmatique : elle ne reste pas dans l’abstraction des interprétations théoriques, mais conditionne concrètement le monde des actions.
l'identité d'une habitus dépend de la façon dont il peut nous conduire à agir, non seulement dans les circonstances où il est généralement donné, mais dans les circonstances où il pourrait potentiellement se donner, indépendamment de sa probabilité. Ce qui est un habitus dépend de quand et comment il nous pousse à l'action. [...] Il n'y a pas de distinction de sens plus subtile que celle qui consiste à une différence dans la pratique. (C.P. 5.400, notre traduction)
Cette théorie est liée à notre réflexion parce qu’elle nous conduit à réfléchir (d’un point de vue différent de celui de Lotman, par exemple) sur la dialectique de stabilisation et subversion, prévisibilité et changement qui traverse et caractérise toute la vie sémiotique. Il s’agit là d’un point central de la dinamyque du sens ; c’est le point où théorie et pratique se rencontre, où la sémiosis et l’action se croisent et le sens se fait modèle d’action, de prévisibilité, de partage, d’appartenance. Comme je l’ai dit, c’est la communauté qui définit les interprétants logiques finales : il n’y a pas de normes, ni d’habitus abstraits et universaux, parce qu’ils dérivent toujours d’un partage et qu’ils sont toujours relatifs à un group donné qui les met en pratique.
Normes, habitus, parcours interprétatifs réguliers (à la Eco) sont donc au même temps :
- sociaux
- réguliers
- variables
- dépendent des exécutions discursives
Ils sont généraux, supra-individuels et pourtant historiques, en transformation continue. Ils définissent et réglementent les arènes discursives, et régissent la formation des énoncés individuels (pour revenir aux catégories foucauldiennes).
Mon idée est que ce niveau des normes et des habitudes est le plus spécifique pour notre étude car c’est à ce niveau que certaines dimensions fondamentales de la culture se manifestent: la dimension super-individuelle (ce qui a une signification culturelle est ce qui représente une dimension partagée collectivement), la dimension historique-évolutive (usages et normes expriment la stratification interprétative et sémiotique, entre persistance, négociation et reformulation), la dimension normalisante (la culture, en dépit de son hétérogénéité interne, a une tendance intrinsèque à l'auto-organisation, à la régularité, à la création de zones d'homogénéité).
Cela ouvre un champ très riche pour la sémiotique de la culture. Le monde des normes, avec leurs interprétations locales, leurs exceptions, leur évolution, leur histoire, non seulement définit un niveau crucial de la culture qui est celui des systèmes qui définissent les politiques de la vérité et du pouvoir d'une certaine culture; mais implicitement ce niveau des normes exprime des formes spécifiques de valorisation et axssiologisation qui constituent les communautés. Partager des habitus signifie faire partie d’une même communauté, une communauté qui n’est ethnique, ni nationale, ni familière, mais sémiotique, culturelle, archéologique (au sens foucaldienne) et que, en tant que telle, constitue l’objet d’étude propre à la sémiotique de la culture.
Bibliographie
BERTRAND, Denis. 2000. Précis de sémiotique littéraire. Paris. Nathan
ECO, Umberto. 1975. Trattato di semiotica generale. Milano. Bompiani
FOUCAULT, Michel. 1966. Les mots et les choses. Paris. Gallimard
FOUCAULT, Michel. 1968. Sur l'archéologie des sciences. Réponse au cercle d'épistémologie. Maintenant dans Dits et écrits. Paris. Gallimard. 1994
FOUCAULT, Michel. 1969. L’archéologie du savoir. Paris. Gallimard
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